Après la suspension du Journal la « Nouvelle Tribune », il y a plus d’un an et demi par la HAAC, la Radio « Soleil FM » vient de subir un sort similaire dans des circonstances différentes. Comme citoyen et écrivain-engagé, c’est-à-dire celui qui revendique la liberté d’expression, je m’étais indigné à l’époque, aujourd’hui mon indignation est encore plus grande.
Sous le prétexte fallacieux d’un pseudo développement, le régime de la Rupture a installé au Bénin un Etat de lois dès les premières heures de son accession au pouvoir. Les lois sur le renseignement, sur le numérique, sur le droit de grève, sur les attroupements non autorisés, la loi sur le système partisan.
Ces lois ont été votées par la septième législature dont le Président a été élu grâce à ce qu’on a appelé à l’époque ‘’la télécommande de Paris’’ qui n’est autre que le tenant du pouvoir actuel, et puis la majorité, des députés, avait rejoint le camp de la Rupture dès l’inauguration de son règne.
Toutes ces lois crisogènes ont précédé la crise électorale et post-électorale d’avril 2019. Le dernier prétendu dialogue, la loi d’Amnistie, la révision accélérée, et opérée nuitamment, de la Constitution du 11 décembre 1990 par le Parlement monocolore et contesté, avec le « OK » ultra rapide des différentes institutions de la République, sont des actes déloyaux et ne peuvent garantir une paix profonde.
En voyant les agissements, il n’y a pas de doute que ce régime a érigé un pouvoir autoritaire en bouchant toutes les voies ordinaires d’aération citoyenne et nous prive des libertés fondamentales. Je me demande parfois s’ils se rendent compte eux-mêmes du mal qu’ils font au pays et à son peuple ?
Le peuple Béninois n’a pas été habitué à de telles stratégies de fragmentation de notre pacte démocratique et social, hérité de la Conférence nationale de février 1990, au profil des lois « prêt-à-porter » et taillées sur mesure. Ce ne sont nullement des mesures de rigueur ou de discipline, ce sont des cadenas juridiques.
Faire régner la peur par la force juridique et républicaine pour tenir un peuple en laisse et imposer une oligarchie et la pensée unique. L’autorité ne peut pas construire une maison et demander à ceux qui sont meurtris, par son hégémonie, d’y habiter. Ce serait un possible traumatisme pour eux. Je disais ceci dans mon essai La soif du pouvoir : « Le concept « autorité » dérive du vocable latin « angeo » qui signifie : faire croître, accroître, augmenter. Cette étymologie évoque un dynamisme qui produit, fait croître et parfait le lien qui unit les êtres. » (p.36).
Nous assistons aux dérives d’un pouvoir de plus en plus autoritaire qui, par conséquent, refuse toute contradiction, toute voix contraire, et combat frontalement les voix tenaces, puis récupère insidieusement les voix mielleuses. L’unité nationale s’effrite et la douleur gagne les cœurs !Ce que nous vivons actuellement ne nous autorise pas à jouer à l’autruche, alors que la situation est d’une extrême gravité et nous sommes pour ainsi dire dans une sorte de prison à ciel ouvert.
La précarité est à la fois matérielle, morale et juridique. Nous n’avons de libertés que si nous chantons les louanges du ‘’roi et de sa cour’’. Celui qui ne le fait pas est tacitement condamné. Nous devons briser les verrous de la peur ; plus vous avez peur, plus on vous fera peur ! Aucun vrai développement ne fonde l’usage de telles nasses dictatoriales. Sauf si, toute proportion gardée, cela sert de pare-feu à des malversations de haut.
Dans mon livre La frénésie du messianisme, j’avertissais en ces termes : « Lorsque la démocratie est mise à l’épreuve de la gouvernance des chefs d’entreprises, il est important pour tout citoyen de réfléchir sérieusement et impartialement aux questions sociopolitiques de façon intelligente, sans laisser aucun aspect, en vue de tirer de bonnes résolutions afin qu’advienne un bon esprit civique et patriotique. »(p. 87).
Arnaud Eric AGUENOUNON
Ecrivain-Essayiste
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