Armement au Maghreb: l’acquisition de sous-marins qui peut tout changer

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Les sous-marins constituent une arme stratégique fondamentale pour toute marine moderne, transformant radicalement l’équilibre des forces navales régionales. Leur furtivité exceptionnelle permet des frappes surprises tout en échappant aux radars ennemis, tandis que leur autonomie offre une présence dissuasive permanente dans des zones contestées. Au Maghreb, cette dimension sous-marine prend une importance croissante alors que le Maroc lance un ambitieux programme d’acquisition pour combler son retard face à l’Algérie, qui dispose déjà d’une flotte impressionnante de sous-marins russes équipés de missiles Kalibr à longue portée.

Une bataille industrielle entre géants européens

La compétition pour fournir les premiers sous-marins marocains oppose principalement Naval Group et ThyssenKrupp Marine Systems. Le constructeur français met en avant son Scorpène, submersible moderne aux batteries lithium-ion offrant une endurance accrue et un système de combat sophistiqué parfaitement adapté aux opérations côtières. L’allemand TKMS riposte avec deux options: le HDW Dolphin doté d’un système de propulsion indépendante de l’air permettant des immersions prolongées, et le HDW 209/1400mod, modèle éprouvé déployé dans plusieurs marines mondiales. D’autres prétendants tentent leur chance, comme la Russie avec son Amur 1650, ou encore la Grèce et le Portugal proposant des unités d’occasion.

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L’ombre du déséquilibre militaire régional

La rivalité maroco-algérienne alimente directement cette course aux armements navals. Alger possède quatre sous-marins de classe Kilo et attend deux unités supplémentaires, créant un déséquilibre critique que Rabat cherche désespérément à corriger. Cette supériorité sous-marine algérienne s’est manifestée lors d’exercices où ses forces ont lancé des missiles de croisière depuis un sous-marin contre des cibles terrestres – une première dans le monde arabe. Pour le Maroc, l’acquisition de submersibles devient une priorité absolue pour protéger son littoral atlantique et méditerranéen, particulièrement dans le contexte tendu du conflit au Sahara occidental où l’Algérie soutient activement le Front Polisario.

La décision finale du Maroc aura des implications stratégiques majeures dépassant le simple cadre militaire. Opter pour Naval Group renforcerait l’influence française déjà établie par la livraison d’une frégate multimissions en 2014 et la possible gestion du futur chantier naval de Casablanca. Choisir TKMS ouvrirait une nouvelle voie de coopération germano-marocaine, diversifiant les alliances de Rabat. Chaque option représente un positionnement géopolitique distinct dans une région où les puissances internationales cherchent à étendre leur influence.

En complément de cette quête sous-marine, Rabat planifie également l’acquisition d’avions de patrouille maritime pour développer ses capacités anti-sous-marines, évaluant notamment l’ATR 295 MPA italien et l’Airbus C-295 MPA. Cette approche s’inscrit dans une modernisation plus large des forces armées marocaines, qui ont récemment acquis des drones de combat turcs Bayraktar TB2 et israéliens, renforçant considérablement leurs capacités de reconnaissance et de frappe. Cette stratégie intégrée vise à protéger efficacement la vaste zone économique exclusive marocaine et à sécuriser le détroit de Gibraltar, passage stratégique du commerce mondial. L’enjeu dépasse largement le cadre bilatéral Maroc-Algérie pour s’inscrire dans la reconfiguration sécuritaire de toute la Méditerranée occidentale, où les capacités sous-marines deviennent un marqueur essentiel de puissance régionale et un levier diplomatique de premier ordre.

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