À l’approche des élections générales de 2026 au Bénin, le climat politique se tend, et les voix critiques se font plus pressantes. Parmi elles, celle de Nourou Dine Saka Saley, militant politique, résonne avec une acuité particulière. Pour celui-ci, l’opposition béninoise, loin de s’opposer fermement à une exclusion qu’il juge en préparation, en serait même complice par sa posture. Une accusation cinglante qui met en lumière les dynamiques complexes du Code électoral et les stratégies politiques à l’œuvre.
Dans une récente intervention, Saka Saley n’a pas mâché ses mots. « Il se prépare une exclusion, mais avec la bénédiction participative de l’opposition », a-t-il déclaré, remerciant au passage le président du Fonac Jean Baptiste Elyias pour ses éclaircissements lors d’une émission télévisée le week-end dernier. Il rappelle avoir « alerté contre la marche vers un parti unique avec la bénédiction de l’opposition au regard de sa posture », mais il a été « taxé de parler et tirer contre son propre camp ». Pour lui, le temps donnera raison à ses avertissements.
Le code électoral et le piège des seuils
Au cœur des préoccupations de Nourou Dine Saka Saley se trouve l’article 146 du Code électoral, une disposition qui, selon lui, verrouille le système au profit des deux formations politiques dominantes. Cet article stipule que « seules sont éligibles à l’attribution des sièges, les listes ayant recueilli au moins 20 % des suffrages valablement exprimés dans chacune des circonscriptions électorales législatives ».
Cependant, une clause additionnelle vient complexifier la donne : « Toutefois, pour les partis politiques ayant conclu et déposé à la Commission électorale nationale autonome préalablement à la tenue du scrutin un accord de coalition parlementaire, il sera procédé, pour le calcul du seuil prévu à l’alinéa précédent, à la somme des suffrages de ceux ayant recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au plan national ».
Pour Saka Saley, cette disposition crée un système à deux vitesses. Les deux partis « majeurs » (faisant référence aux partis de la majorité présidentielle) pourront se partager la quasi-totalité des 109 sièges de l’Assemblée nationale grâce à la règle des 10% au plan national en cas de coalition. Pendant ce temps, les « partis satellites de la majorité » et même les nouvelles formations en création, même avec un maigre 0,2% des voix, pourraient s’en sortir avec « un ou deux postes de nomination », en guise de « récompense » pour leur « collaboration ». « Qu’aucun commentaire niais ne vienne parler de rassemblement de l’opposition », martèle-t-il, dénonçant ce qu’il perçoit comme une mascarade.
L’occasion manquée des Démocrates
La critique de Nourou Dine Saka Saley vise particulièrement le parti de l’opposition, Les Démocrates (LD). Il estime que les 28 députés de ce parti ont raté une occasion historique de poser un acte fort face à leur marginalisation perçue à l’Assemblée nationale.
Saka Saley avait suggéré une démission collective de ces 28 députés afin de provoquer des élections partielles dans leurs circonscriptions. Selon l’article 150 du Code électoral, si plus d’un cinquième des députés (soit au moins 22 sur les 109) démissionnent, des élections doivent être organisées dans les circonscriptions concernées. Les députés LD étant présents dans 15 des 24 circonscriptions, cette initiative aurait été un « coup politique » majeur.
Pour Saka Saley, ce geste aurait eu une double portée. D’une part, il aurait démontré à l’opinion publique que les députés LD ne sont pas à l’Assemblée pour des intérêts personnels, mais pour défendre des idéaux, notamment la libération des détenus politiques et le retour des exilés. D’autre part, et c’est crucial, cela aurait ouvert un débat national « sur les effets pratiques du nouveau Code électoral, évitant ainsi de futurs blocages » et « permettant une évaluation rapide et concrète du Code électoral, plutôt que de subir ses conséquences plus tard ». En clair, il s’agissait de « crever l’abcès ».
Une opposition passive et peu audible
Nourou Dine Saka Saley regrette amèrement que sa proposition ait été ignorée. Il déplore l’image actuelle des députés de l’opposition : celle d’une « opposition systématique, peu audible dans les débats parlementaires, et absente d’initiatives politiques marquantes ». Il estime que cette posture de « contestation permanente » n’est pas efficace et qu’un « coup politique » aurait permis aux élus LD de sortir de cette image passive pour adopter une stratégie plus offensive.
Bien qu’il reconnaisse n’être ni un dirigeant du parti, ni un élu, Saka Saley insiste sur l’urgence de faire preuve de courage politique », face à la « bipolarisation politique » actuelle. Il déplore « une opposition passive, à qui l’on reproche de n’avoir apporté aucune véritable victoire parlementaire au cours de la législature en dehors de l’échec de la révision de la constitution ».
Les reproches de Nourou Dine Saka Saley résonnent comme un appel à une réévaluation profonde des stratégies de l’opposition béninoise. Alors que les échéances électorales de 2026 se profilent, la question de la participation équitable et de la représentativité politique reste au cœur des débats, soulevant des interrogations sur la vitalité démocratique du pays. Les prochaines années diront si les voix comme celle de Saka Saley seront entendues, et si l’opposition saura se réinventer pour peser véritablement sur le cours politique du Bénin.
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