Maghreb : la finance islamique atteint un montant record dans ce pays


La finance islamique repose sur des fondements éthiques et religieux qui la distinguent nettement de la finance conventionnelle. À la différence des systèmes classiques, elle interdit toute forme d’intérêt (riba) et privilégie les contrats fondés sur le partage des profits et des pertes, l’investissement productif et l’adossement à des actifs réels. Les produits proposés, qu’il s’agisse de la mourabaha, de l’ijara ou du moucharaka, obéissent à un encadrement strict dicté par la charia, visant à instaurer une justice contractuelle et à éviter la spéculation excessive. Cette approche séduit de plus en plus de clients dans les pays à majorité musulmane, mais aussi au-delà, pour sa promesse d’une finance plus responsable, enracinée dans l’économie réelle.

L’Algérie accélère le pas vers une transformation bancaire

En Algérie, cette forme de finance a connu une ascension fulgurante ces dernières années, au point de franchir des seuils records en matière de collecte de dépôts et de financement. Loin d’un simple engouement passager, le développement de la finance islamique y prend des allures de transformation profonde. Depuis 2020, le pays a vu émerger deux banques exclusivement dédiées à cette finance ainsi que dix guichets spécialisés au sein d’établissements classiques. Ce maillage institutionnel, bien que récent, témoigne d’une volonté affirmée d’intégrer durablement ce modèle dans le paysage bancaire national.

Avec une croissance annuelle estimée entre 25 et 30 %, le rythme est soutenu et constant. Plus impressionnant encore, les dépôts collectés par le secteur ont dépassé les 900 milliards de dinars en seulement quatre années. Selon Sofiane Mazari, président de la Commission de la finance islamique au sein de l’Association professionnelle des banques et établissements financiers (Abef), ce chiffre illustre la capacité du secteur à attirer massivement l’épargne nationale depuis son lancement.

Cette dynamique reflète non seulement un engouement du public, mais aussi une adaptation rapide des institutions financières aux nouvelles attentes. Elle repose sur une adhésion croissante des citoyens à des valeurs de transparence, de partage des risques et de soutien à l’économie productive.

Un moteur pour l’économie réelle

L’un des traits les plus marquants de cette évolution réside dans la destination des financements octroyés. Plus de 600 milliards de dinars ont été injectés à travers des produits islamiques, dont une large majorité, environ 70 %, a été orientée vers le tissu entrepreneurial. Ce choix stratégique indique clairement que la finance islamique ne se limite pas à une alternative morale : elle devient un levier actif pour stimuler les petites et moyennes entreprises, renforcer l’investissement local et revitaliser les chaînes de valeur internes.

À titre d’exemple, un entrepreneur souhaitant acquérir du matériel pour lancer son activité peut recourir à une opération de mourabaha, par laquelle la banque achète l’équipement pour le lui revendre avec une marge clairement définie. Ce type de financement garantit la transparence des transactions tout en minimisant les incertitudes liées à l’endettement. Résultat : des entreprises mieux accompagnées et des fonds orientés vers des usages tangibles, concrets, générateurs d’emplois.

Un virage stratégique au potentiel prometteur

La progression rapide de la finance islamique en Algérie ne relève pas d’un hasard, mais d’une stratégie coordonnée entre régulateurs et acteurs bancaires. En structurant un environnement favorable – de la formation des agents à la standardisation des produits – le pays prépare le terrain à une diversification de son système bancaire. Cette montée en puissance arrive dans un contexte où l’exigence de modèles plus éthiques et inclusifs gagne du terrain, tant au niveau national qu’international.

Derrière les chiffres impressionnants se dessine un changement de paradigme : la finance islamique n’est plus perçue comme un secteur marginal, mais comme un pilier à part entière du système financier algérien. Ce virage offre une opportunité unique d’élargir l’accès au crédit, de bancariser des franges jusque-là exclues du système classique, et de créer des ponts entre modernité économique et référents culturels.

L’enjeu désormais est de consolider cette trajectoire en poursuivant l’innovation financière, en renforçant la confiance des clients et en assurant une supervision rigoureuse. Car si les fondations sont désormais posées, c’est sur leur solidité que reposera la pérennité de ce modèle.

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