Le Maghreb vit depuis plusieurs décennies sous la menace constante du stress hydrique. Cette région aride, soumise à un climat de plus en plus imprévisible, voit ses ressources en eau douce diminuer tandis que la demande explose, portée par la croissance démographique, l’urbanisation rapide et l’expansion agricole. Le Maroc, l’Algérie et la Tunisie partagent ce défi : nappes phréatiques surexploitées, barrages à des niveaux historiquement bas, épisodes de sécheresse prolongés et mauvaise gestion des ressources rendent la situation critique. Les villes voient leurs robinets tarir, les campagnes se désertifient, et les tensions sociales liées à l’eau s’aggravent. L’eau est devenue un enjeu de souveraineté autant qu’un facteur de stabilité. Des projets d’envergure deviennent non seulement souhaitables, mais vitaux.
Une stratégie de résilience au service d’un modèle durable
Conscient des menaces croissantes que fait peser la crise de l’eau, le Maroc a décidé de faire de la rareté hydrique un levier de transformation. L’ambition est claire : construire une infrastructure robuste capable de répondre aux besoins futurs du pays tout en assurant la sécurité de ses ressources essentielles. Ce plan d’action, qui s’inscrit dans la durée, s’appuie sur une série d’initiatives innovantes destinées à renforcer la résilience face aux bouleversements climatiques.
Un programme d’investissement colossal pour des solutions intégrées
Un partenariat majeur a récemment été officialisé entre l’État marocain et un groupe maroco-émirati. Il a réuni, la société émiratie Taqa, active dans le secteur de l’énergie, le groupe marocain Nareva, et le Fonds Mohammed VI pour l’investissement et prévoit d’injecter plus de 12 milliards d’euros dans un vaste programme d’ici 2030. L’objectif : repenser en profondeur l’approvisionnement en eau et en électricité.
Le dessalement comme pilier de l’approvisionnement futur
L’un des volets clés de cette stratégie repose sur la construction de cinq unités de dessalement d’eau de mer. Autrefois marginales en raison de leur coût élevé, ces technologies s’imposent aujourd’hui comme une réponse incontournable aux besoins croissants des zones côtières. Elles permettront de diminuer la pression sur les réserves souterraines et fluviales, tout en garantissant un accès continu à l’eau potable pour les grandes villes.
Parallèlement, un projet hydraulique entre deux bassins majeurs du pays est prévu. Ce dispositif doit permettre une meilleure distribution des ressources en fonction des saisons et des régions, réduisant ainsi les inégalités et les tensions liées à l’accès à l’eau.
Connecter l’eau et l’énergie : une vision systémique
Au-delà de l’aspect hydrique, l’accord englobe également le secteur énergétique. Une “autoroute de l’électricité” sera développée pour transporter l’énergie produite, en grande partie à partir de sources renouvelables, vers les centres de consommation. Cette initiative vise à garantir une alimentation électrique stable, indispensable notamment au fonctionnement des unités de dessalement.
Un pari sur les partenariats Sud-Sud
Ce projet de grande ampleur illustre également une dynamique nouvelle de coopération entre pays du Sud. Les financements émiratis ne se limitent pas à un simple soutien économique ; ils traduisent un alignement stratégique entre acteurs partageant une vision commune du développement durable. En attirant ces capitaux, le Maroc cherche à accélérer sa transition énergétique et hydrique tout en consolidant sa souveraineté sur des ressources vitales.
Transformer une crise en opportunité régionale
Ce vaste chantier traduit une volonté de rompre avec les logiques d’urgence ponctuelle pour construire une réponse systémique et pérenne. En se positionnant comme pionnier d’un nouveau modèle de résilience face à la pénurie d’eau, le Maroc ouvre une voie que pourraient suivre d’autres pays du Maghreb. L’eau devient ici bien plus qu’une nécessité : elle est le moteur d’un développement tourné vers l’avenir.
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