La présidence de la Banque africaine de développement change de mains après près d’une décennie marquée par le leadership du Nigérian Akinwumi Adesina. Avec la fin de ce mandat, les projecteurs étaient braqués sur une poignée de candidats africains réputés pour leur expertise en développement. Parmi eux figurait Amadou Hott, ancien ministre sénégalais de l’Économie, dont la candidature a été saluée pour sa rigueur et sa vision. Pourtant, c’est le Mauritanien Sidi Ould Tah qui a été désigné pour diriger l’institution panafricaine, à l’issue d’une sélection âprement disputée.
La désignation de ce dernier, ancien directeur général de la Banque arabe pour le développement économique en Afrique (BADEA), ne représente pas un choix par défaut mais plutôt une reconnaissance de ses années d’engagement en faveur de projets économiques inclusifs à travers le continent. Elle intervient dans un contexte où les enjeux de développement, d’investissement et de souveraineté économique sont au cœur des priorités régionales.
Sonko joue la carte diplomatique à Abidjan
Le Premier ministre sénégalais, Ousmane Sonko, a profité d’un séjour officiel en Côte d’Ivoire pour rencontrer personnellement Sidi Ould Tah. Lors de cet entretien, il a tenu à lui adresser ses félicitations au nom du gouvernement sénégalais, mettant en avant une proximité fraternelle entre les deux pays. Dans un ton conciliant et empreint d’unité, il a déclaré que le succès de la Mauritanie devait aussi être perçu comme celui du Sénégal, soulignant l’importance de dépasser les logiques de compétition entre États voisins au profit d’une dynamique continentale.
Cette attitude d’ouverture contraste avec les murmures de frustration entendus dans certains cercles au Sénégal, où la non-élection d’Amadou Hott a été vécue comme une désillusion. Sonko, en réagissant rapidement et de manière publique, semble avoir voulu éviter toute crispation diplomatique ou interprétation clivante de l’événement.
Un message politique et régional fort
En s’exprimant à travers ses canaux officiels, le Premier ministre a insisté sur l’essentiel : la victoire de compétences africaines au service d’une institution stratégique. En choisissant ses mots avec soin, il a reconnu la qualité de toutes les candidatures, tout en mettant l’accent sur l’intérêt commun. Ce positionnement peut également être interprété comme une manière de rappeler l’importance de l’unité dans les décisions stratégiques, notamment dans le domaine économique où les clivages nationaux peuvent freiner les dynamiques collectives.
Par-delà les félicitations protocolaires, le discours de Sonko adresse un signal à l’opinion publique : l’ambition du Sénégal dans les sphères internationales reste intacte, même face à des revers. Son hommage appuyé à Amadou Hott s’inscrit dans cette volonté de rassurer, valoriser les compétences nationales et éviter que la scène internationale soit perçue comme une arène de défaite plutôt que d’opportunité.
Cette posture, à la fois sobre et affirmée, illustre une diplomatie en mutation, tournée vers la coopération active tout en cultivant une conscience aiguë des enjeux de représentativité. À l’heure où la BAD entre dans un nouveau cycle de gouvernance, Dakar entend bien rester un interlocuteur de poids, avec ou sans fauteuil présidentiel.
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