Sénégal : Tabask’Cuir transforme Golf Sud en moteur d’un cuir 100% local

Chaque année, des centaines de milliers de moutons sont sacrifiés à l’occasion de la Tabaski au Sénégal. Et pourtant, une fois les festivités terminées, un paradoxe se répète : près de 70 % des peaux issues de ces bêtes finissent à la poubelle ou à l’air libre, abandonnées sans valorisation, alors qu’elles pourraient nourrir un secteur artisanal porteur. Ce gâchis économique et écologique est désormais dans le viseur des autorités.

Avec l’initiative Tabask’Cuir, portée par la Direction de l’Artisanat, le Sénégal tente de convertir ce déchet négligé en matière première précieuse. Golf Sud a été choisie comme commune pilote pour tester cette nouvelle approche. Sur le terrain, une cinquantaine de volontaires ont été mobilisés pour accompagner la population dans le tri, la collecte et la conservation des peaux. Une logistique légère mais stratégique, qui a permis de récolter pas moins de 3 000 unités en quelques jours.

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Un pari sur l’autonomie des artisans locaux

Cette opération ne se limite pas à une simple action symbolique. Il s’agit de constituer une réserve de cuir brut exploitable, issue à 100 % de l’abattage local, et donc parfaitement adaptée aux savoir-faire artisanaux du pays. En relançant cette ressource, la Direction de l’Artisanat espère dynamiser tout un pan de l’économie informelle, souvent marginalisé mais riche en créativité.

Dr Diouf, en charge du projet, a invité l’ensemble des artisans à s’approprier cette matière première nationale. Ce cuir, disponible localement et collecté dans le respect des normes, offre une alternative économique aux importations souvent coûteuses et moins traçables. Pour les jeunes tanneurs, maroquiniers ou stylistes en quête de matériaux fiables, ce geste représente une bouffée d’oxygène.

Les perspectives ne manquent pas. Si ce modèle de collecte localisée prouve son efficacité, il pourrait être déployé dans d’autres communes dès l’an prochain. Cela exigerait toutefois des investissements dans la formation, la conservation des peaux, et la structuration des circuits de distribution. Mais l’élan est là, et la volonté politique semble au rendez-vous.

Du déchet au levier de croissance

Le cuir est une matière qui vit, qui dure, et qui raconte une histoire. En redonnant de la valeur à ces peaux traditionnellement perçues comme des résidus sans importance, le projet Tabask’Cuir change de manière concrète le regard porté sur les déchets de fête. Il ne s’agit pas d’un simple geste écologique, mais bien d’une action qui lie artisanat, culture, emploi et souveraineté économique.

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Golf Sud, en servant de laboratoire, montre qu’un changement de mentalité est possible. Les résultats obtenus en quelques jours, grâce à la mobilisation citoyenne, prouvent que la transition vers un cuir local et valorisé n’est pas une utopie. C’est une opportunité à saisir, à multiplier, et à faire grandir.

À l’heure où la jeunesse cherche de nouveaux repères économiques, miser sur ce type d’initiative revient à construire un avenir ancré dans les savoirs traditionnels, tout en créant les conditions d’un marché plus autonome. Le cuir de Tabaski pourrait bien devenir l’un des symboles d’un artisanat national qui ne se contente plus de survivre, mais qui revendique sa place dans le tissu productif du pays.

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