L’autorisation à nouveau donnée pour l’exportation des produits vivriers béninois relance le débat sur l’équilibre à trouver entre marché intérieur et ouverture commerciale. Pour le gouvernement, cette levée marque la fin d’une étape planifiée et s’inscrit dans une logique de développement économique intégré.
L’annonce a été confirmée ce vendredi par le porte-parole du gouvernement, Wilfried Léandre Houngbédji, au cours d’un point presse tenu dans les locaux du journal Le Béninois Libéré. À cette occasion, il a présenté les principaux objectifs qui sous-tendent cette évolution : souveraineté alimentaire, soutien à l’industrialisation, et meilleure gouvernance fiscale. « Lorsque nous avons annoncé l’interdiction, ce n’était ni formel, ni intemporel », a-t-il rappelé.
D’après lui, la suspension décidée en 2023 n’avait rien de définitif. Elle visait à protéger l’approvisionnement des industries locales, notamment celles installées dans la zone économique spéciale de Glo-Djigbé. Il s’agissait aussi d’assurer une certaine stabilité sur le marché intérieur pendant une phase de transition.
À ceux qui redoutent une hausse des exportations au détriment de la demande locale, Wilfried Houngbédji a opposé les efforts engagés pour soutenir la production nationale. Le gouvernement a mobilisé 26 milliards de francs CFA pour la campagne agricole en cours. Ce soutien, affirme-t-il, justifie que les récoltes alimentent d’abord les besoins internes.
« Ce serait irresponsable de laisser tout partir à l’exportation alors que l’argent injecté vient de l’ensemble des Béninois. » Il précise en outre que l’État ne fixe pas les prix. Ceux-ci sont déterminés par les interprofessions agricoles. En réponse aux critiques exprimées par certains commerçants, le porte-parole a évoqué les contrôles opérés au port de Cotonou. Objectif : suivre de près les sorties de marchandises et garantir le versement effectif des droits et taxes dus à l’État.
« L’encadrement des exportations s’inscrit aussi dans une logique de transparence et de justice fiscale. » Concernant les prix plus attractifs proposés par certains acheteurs internationaux, Wilfried Houngbédji a mis en garde contre une dépendance économique qui pourrait nuire à la stratégie industrielle du pays. « Ils proposent des prix élevés, car ils savent qu’ils vont transformer dans leurs pays. C’est une forme de dépendance structurelle, voire d’impérialisme industriel. » Selon lui, l’ambition du gouvernement reste inchangée : renforcer la transformation locale des produits agricoles, générer de l’emploi, et sécuriser les chaînes de valeur.
« Exporter la totalité des récoltes sans alimenter les usines nationales reviendrait à saboter les efforts déployés pour créer des emplois et renforcer la souveraineté économique du pays. » Dans cette logique, la montée en puissance de la zone de Glo-Djigbé joue un rôle stratégique. « Aujourd’hui, on confectionne les tenues de nos militaires et policiers à Glo-Djigbé. Nous avons commencé à transformer le coton, le cajou, le soja. Et pourquoi pas le maïs demain ? »
Enfin, Wilfried Houngbédji a insisté sur la nécessité d’un travail de pédagogie pour mieux faire comprendre ces choix économiques aux producteurs : « Les paysans comprennent très bien lorsqu’on leur explique. » Il conclut en précisant que cette levée n’est pas un revirement, mais l’aboutissement logique du dispositif annoncé deux ans plus tôt.
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