Alors que le Sénégal s’apprête à finaliser le retrait des deux dernières bases françaises encore actives sur son territoire, le président Bassirou Diomaye Faye et son homologue Emmanuel Macron se sont retrouvés à Séville pour échanger sur les contours d’un nouveau partenariat. Ce tête-à-tête, en marge de la Conférence internationale sur le financement du développement, intervient dans un contexte où Dakar affirme une volonté claire de redéfinir les paramètres de ses relations bilatérales. En initiant le démantèlement des installations militaires françaises – trois déjà restituées sur un total de cinq –, le Sénégal ne ferme pas la porte à la coopération, mais en recompose les fondations.
Plutôt que de nourrir les tensions, cette décision ouvre la voie à une lecture plus mature des relations franco-sénégalaises. La souveraineté devient l’axe structurant du dialogue, non pas au détriment du partenariat, mais comme condition de sa durabilité. Emmanuel Macron a souligné l’importance de continuer à travailler ensemble sur les enjeux économiques, culturels, sécuritaires et mémoriels, tout en saluant le rôle du Sénégal dans la stabilité régionale. Ce recentrage des priorités traduit une volonté partagée d’éviter le piège d’une coopération déséquilibrée ou paternaliste.
Au-delà des bases, un partenariat à refonder
Le climat des échanges entre les deux présidents ne laisse pas présager de rupture brutale, mais plutôt d’une réorientation lucide. Si les aspects militaires ont dominé les discussions médiatiques ces derniers mois, la rencontre de Séville a permis de repositionner les vrais chantiers de l’avenir : investissement productif, justice fiscale, transition énergétique, échanges culturels et gouvernance régionale. Le partenariat est donc appelé à se libérer des seuls marqueurs hérités du passé colonial pour s’aligner sur des intérêts réciproques.
Du côté de Dakar, cette refondation prend la forme d’une stratégie assumée. Le Sénégal entend parler d’égal à égal avec ses partenaires et faire valoir ses propres priorités de développement. La fin annoncée de la présence militaire française ne signifie pas la fin des relations, mais leur requalification. Cette approche pourrait servir de modèle pour d’autres pays du continent confrontés à la même équation : comment conserver les bénéfices d’une coopération sans se priver de la liberté stratégique qu’impose la souveraineté.
Une page tournée, un chapitre à écrire
À Séville, les images ont tranché avec celles des cérémonies de passation de drapeau dans les anciens camps français. Plutôt que de céder à la symbolique de la rupture, les deux chefs d’État ont cherché à projeter une vision. Emmanuel Macron a insisté sur le rôle moteur du Sénégal dans les dynamiques africaines et mondiales. Bassirou Diomaye Faye, quant à lui, a évoqué la nécessité d’asseoir une coopération efficace, ancrée dans les réalités et les aspirations des peuples.
Ce nouveau dialogue s’annonce exigeant. Il impose à la France une adaptation profonde de son rôle sur le continent et au Sénégal une capacité à redéployer ses alliances avec discernement. Mais dans cette complexité géopolitique, un point semble faire consensus : les anciennes recettes ne fonctionnent plus. La rencontre de Séville n’a pas simplement été un échange de courtoisie diplomatique. Elle marque un moment de bascule, où les choix politiques sont appelés à refléter des équilibres renouvelés entre partenaires qui se veulent désormais francs, égaux et responsables.
Laisser un commentaire