La tension politique au Sénégal prend une nouvelle tournure avec la saisie de l’ONU par cinq anciens ministres du gouvernement de Macky Sall. Accusés de diverses malversations, ces responsables du précédent régime ont décidé de porter leur cause devant les instances internationales, dénonçant une justice qu’ils jugent partiale et injuste. L’enjeu dépasse la simple défense des individus impliqués ; il soulève des questions sur l’indépendance de la justice au Sénégal et sur la manière dont certaines affaires politiques sont traitées par les autorités judiciaires.
Une procédure contestée et des accusations graves
Les cinq anciens ministres incriminés — Amadou Mansour Faye, Aïssatou Sophie Gladima, Moustapha Diop, Salimata Diop et Ismaïla Madior Fall — ont décidé de prendre la voie internationale après leur inculpation par la Commission d’instruction près la Haute cour de justice. Trois d’entre eux ont été placés en détention, tandis que les deux autres, Salimata Diop et Ismaïla Madior Fall, ont été libérés sous conditions. Les accusés dénoncent ce qu’ils considèrent comme un procès inéquitable, soulignant que la juridiction chargée de leur jugement fonctionne d’une manière qui ne respecte pas les normes internationales en matière de procès équitables. Selon eux, la composition de cette juridiction et son mode de fonctionnement — en particulier le fait que ses décisions ne sont pas susceptibles d’appel — créent un climat d’injustice et d’irrégularité procédurale.
En réaction à ces accusations, un cabinet d’avocats français, assisté par un collectif d’avocats sénégalais, a été mandaté pour saisir la Rapporteuse spéciale de l’ONU sur l’indépendance des juges et des avocats, Margaret Satterthwaite. Les ministres incarcérés dénoncent ainsi « plusieurs violations graves de l’indépendance judiciaire et des garanties de procès équitables », et espèrent obtenir un soutien international pour faire entendre leur voix.
Un contexte politique tendu et des perspectives internationales
L’incarcération de ces ministres et les procédures qui en découlent sont loin d’être des affaires de pure routine judiciaire. Ces inculpations s’inscrivent dans un contexte de tensions politiques entre l’opposition et le pouvoir actuel, où les accusations de mauvaise gestion des fonds publics et de corruption sont fréquentes. Les opposants au gouvernement de Macky Sall estiment que ces poursuites visent plus à affaiblir l’ancien régime qu’à rendre justice de manière impartiale.
Dans ce climat, l’appel à l’ONU prend une dimension politique majeure. Les ministres inculpés, soutenus par leurs avocats, cherchent à obtenir une reconnaissance internationale de ce qu’ils considèrent comme une violation de leurs droits. La saisine de la Rapporteuse spéciale sur l’indépendance des juges pourrait avoir des répercussions sur l’image du Sénégal, en particulier en ce qui concerne le respect des droits humains et de l’État de droit. Si l’ONU accepte de se saisir de l’affaire, cela pourrait exercer une pression supplémentaire sur le gouvernement sénégalais pour qu’il réévalue ses procédures judiciaires.
Les défenseurs des ministres inculpés demandent non seulement une révision des procédures en cours, mais aussi une réforme en profondeur du système judiciaire sénégalais, afin qu’il soit à la hauteur des exigences internationales en matière de justice. Ainsi, l’affaire des ministres inculpés, loin de se limiter à un simple contentieux judiciaire, pourrait devenir un révélateur des défis structurels auxquels le Sénégal est confronté en matière de gouvernance et d’équité judiciaire.
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