Alors que les énergies fossiles continuent de soulever des préoccupations environnementales et géopolitiques, l’hydrogène vert s’impose progressivement comme une alternative crédible pour la transition énergétique. Produit à partir d’énergies renouvelables, il permet de stocker et transporter de l’électricité sous forme gazeuse, avec pour avantage de ne rejeter que de la vapeur d’eau lors de son utilisation. Ce vecteur énergétique est particulièrement prisé dans les secteurs industriels, maritimes et aériens, qui peinent à se décarboner. En Europe, les mécanismes de soutien à la production et au transport se structurent rapidement, posant les bases d’un futur marché dynamique. C’est dans cette dynamique que l’Algérie commence à occuper une place remarquée.
Un dialogue technique et politique en pleine accélération
Lors du sommet mondial consacré à l’hydrogène vert, qui se déroule actuellement à Amsterdam, l’Algérie a mis en avant ses projets à travers une série de rencontres de haut niveau. Le professeur Noureddine Yassa, représentant le ministère de l’Énergie, s’est entretenu avec des délégations venues d’Australie, du Japon et d’Oman pour explorer des pistes de collaboration. Ces échanges illustrent un intérêt croissant pour le marché algérien, considéré comme prometteur pour la production à grande échelle de cette molécule stratégique.
Parmi les discussions clés, celle avec María Sicilia, coprésidente de l’initiative « European Hydrogen Backbone », a porté sur les modalités de transport de l’hydrogène produit en Algérie vers les infrastructures européennes. L’objectif : intégrer le potentiel algérien dans le futur réseau continental de distribution. Ce dialogue technique renforce une dynamique engagée depuis plusieurs mois avec plusieurs pays européens, notamment l’Allemagne, l’Autriche, l’Espagne et l’Italie, autour de projets de coopération énergétique.
Un cadre d’investissement en cours de stabilisation
Pour soutenir le développement de ce marché émergent, les autorités algériennes ont déjà esquissé un programme ambitieux visant une production de 40 térawattheures à l’horizon 2040. Ce volume reposerait essentiellement sur des installations solaires de grande capacité, réparties sur le territoire national. Le projet SoutH2, en cours d’étude, pourrait constituer l’un des canaux de livraison principaux entre l’Algérie et le marché européen. Il prévoit un acheminement direct de l’hydrogène vers le nord de la Méditerranée via un pipeline dédié.
Dans le même temps, l’Union européenne poursuit la structuration de son marché intérieur avec l’annonce récente de subventions de l’ordre de 1 milliard d’euros destinées à soutenir des projets pilotes de production dans trois pays — l’Allemagne, l’Espagne et l’Irlande. Ce mécanisme d’appui renforce la visibilité pour les producteurs potentiels, même situés hors de l’espace communautaire, en offrant des perspectives de rentabilité à moyen terme.
Un positionnement stratégique entre climat et diplomatie énergétique
L’Algérie ne se contente pas de développer une filière énergétique. Elle cherche à inscrire cette démarche dans une logique de coopération à long terme. En tissant des liens avec des pays consommateurs comme ceux d’Europe occidentale, mais aussi en s’ouvrant à des partenaires d’Asie-Pacifique, elle consolide sa position dans une chaîne de valeur qui se redéfinit rapidement.
Le pari est double : créer de la valeur localement à travers une nouvelle industrie et devenir un acteur incontournable dans le commerce énergétique bas-carbone. Pour cela, Alger mise sur un environnement naturel favorable, des ressources humaines qualifiées et un socle diplomatique actif. Si les projets actuels se concrétisent, le pays pourrait bien transformer ses atouts géographiques en levier économique, contribuant ainsi à redessiner les équilibres énergétiques autour de la Méditerranée.
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