Engagé dans une lutte encourageante contre la corruption, Patrice Talon n’a pourtant jusque là pas convaincu la majorité de ses compatriotes de la sincérité de son combat. Et pour cause, aussi bien le timing de la lutte que les cibles choisies laissent à désirer. Ils font croire que cette lutte, au lieu d’être une mission républicaine de salubrité, prend le visage d’une campagne de répression et d’intimidation des pourfendeurs de sa politique.
L’un des grands chantiers sur lequel les Béninois attendent leur président est celui de la lutte contre la corruption. Car, si beaucoup d’entres eux lui ont accordé leur suffrage en 2016, c’est en grande partie à cause de son discours de campagne sur la lutte impitoyable contre la corruption. Le 06 avril 2016, dans son discours d’investiture, Talon a déclaré solennellement que « la lutte contre la corruption est un combat de tous les jours ».
Mais une fois au pouvoir, sa détermination affichée pendant la campagne s’est progressivement émoussée. Ce qui était naguère une priorité a commencé à devenir le dernier des soucis. Le chef de l’Etat a mis le coude sur les nombreux rapports d’audits qu’il a commandités dans plusieurs sociétés et offices d’Etat, et dans certains ministères. Cette attitude est venue aggraver les premiers soupçons qui font dire à certains que le chef d’Etat a décidé de protéger les prévaricateurs, au lieu de les livrer à la justice. Il suffit de voir ses premières nominations pour s’en convaincre. Un prévaricateur condamné par la justice comme préfet du Littoral, et un ministre de la décentralisation à casseroles. D’autres attitudes peu rassurantes ont suivi. Il s’agit du retour en force des conflits d’intérêt et des marchés gré à gré au sommet de l’Etat. A l’Assemblée nationale, il s’est accoquiné avec des députés corrompus pour constituer sa majorité. Pendant près de deux ans, rien n’a bougé sur le terrain de la lutte contre la corruption. Puis, un jour au cours d’un Conseil des ministres, le gouvernement publie un extrait du rapport d’audit à la Caisse nationale de sécurité sociale (Cnss), et dénonce des placements illégaux de fonds de la caisse auprès de la Bibe, une banque alors en faillite. Il fallu attendre le 14 février dernier pour voir les premières actions de lutte contre la corruption… a travers la demande de levée d’immunité de six personnalités politiques impliquées dans divers dossiers de malversations financières.
Lutte-spectacle
En dépit de la communication organisée depuis quelques jours pour démontrer le caractère impartial et sincère de la lutte actuelle contre la corruption, bon nombre de Béninois ont du mal à y croire. Hormis l’arrestation